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L'Agent Geai - 12

Le Gardien

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Le matin annonçait une belle journée ensoleillée, le ciel était parfaitement bleu, et une légère brise faisait bruisser les feuilles des arbres. Avant même qu'Étincelle et Bouboule ne fussent éveillés, les oiseaux s'interpellaient joyeusement les uns les autres à travers toute la forêt, en sautant de branche en branche, les Tamias1 répondaient à leur manière avec des piallements aigûs.

Tandis que les Enfants-Alouettes finissaient leur petit-déjeûner, l'Agent Geai vint les voir, ses plumes colorées étaient resplendissantes, en particulier en plein soleil.

« Aujourd'hui est un jour idéal pour visiter le Paradis, » dit-il, « je suis venu pour vous escorter jusqu'au Gardien de l'Entrée, je suis sûr qu'il acceptera de vous faire entrer dans ce merveilleux pays. »

« C'est très gentil d'avoir pensé à nous, » dit Étincelle, « on est fin prêts. »

Ils s'envolèrent au dessus de la cîme des arbres et se dirigèrent vers le centre de la forêt.

« Il est où est votre casque ? Et votre bâton d'Agent de Police ? » demanda Bouboule au Geai.

« Je les ai laissés chez moi, » répondit le Geai, « je ne suis pas en servide, aujourd'hui, et le Gardien n'aime pas trop la vue de tout ce qui ressemble à une arme. Dans son pays, il n'y a jamais de querelles, de bagarres ni de méchanceté d'aucune sorte, car ils ont tout ce dont ils ont besoin et aucune raison de se disputer. Les Oiseaux de Paradis ont quand même des lois, mais ils y obéissent de leur propre gré, non par contrainte. Ça serait un pays ennuyeux pour un Policier. »

« Mais ça serait bien pour les autres. » dit Étincelle.

« Peut-être, » admit le Policier avec réticence, « mais des fois, je me dis que les endroits paradisiaques doivent être lassants, à force. Dans notre côté de la forêt, il y a peu d'action, car les plus gros oiseaux obéissent par peur du châtiment, je crois que c'est la même chose dans le monde des hommes. Mais au Paradis des Oiseaux, il n'y a qu'une seule race, chacun d'eux prend garde de ne pas nuire à son prochain. C'est pourquoi ils n'admettent aucun élément perturbateur dans leur pays. Si on vous laisse entrer, très chers, il faudra faire attention de n'offenser personne. »

« On va essayer. » promit Bouboule.

« Je n'oserais jamais emmener un oiseau ordinaire là bas, » continua le Geai, en volant rapidement pendant la conversation, « mais vous deux êtes différents, vous êtes plus proches des Oiseaux du Paradis2 que de ceux de la forêt. C'est pourquoi je sens que le Gardien vous acceptera. »

« Des fois, il m'arrive d'être méchante, Bouboule aussi, » dit Étincelle avec franchise, « mais j'essaie le plus possible de pas l'être. »

« Je suis sûr que vous vous conduirez très bien. » répondit le Geai.

Au bout d'un moment, ils virent la lueur rosée qui se reflétait dans le ciel bleu, ils se dirigèrent vers sa douce clarté qui semblait augmenter en intensité, elle ne les éblouissait pas, mais à mesure qu'elle se diffusait autour d'eux, le groupe ressentait une douce euphorie.

La brise se rafraichit alors et souffla de plus en plus fort, les poussant doucement mais fermement, au point que bientôt, ils s'aperçurent qu'ils n'avançaient plus du tout, ils flottaient sur place dans l'air.

« Posons nous à terre. » murmura le Geai. Une fois qu'ils eurent obéi, ils sentirent que le vent devenait moins fort.

« C'est un secret que j'ai appris il y a longtemps, » expliqua leur ami, « la plupart des oiseaux qui essaient d'entrer au Paradis essaient de lutter contre le vent,, et ils sont toujours repoussés, il n'y a qu'un seul moyen d'approcher le Gardien assez près pour lui parler. Après, tout dépend de sa bonne volonté de vous laisser aller plus loin. »

Ils s'arrêtèrent pour se reposer un peu et reprendre leur respiration. Soudain, Étincelle et Bouboule poussèrent un cri de surprise ; il y avait devant eux un bosquet majestueux, les troncs des arbres n'étaient pas en bois, mais or et en argent poli, avec des feuilles métalliques aux couleurs exquises. Au pied des arbres poussait un massif de fleurs multicolores de toutes formes qui, brusquemment, se mirent à entonner un chant de bienvenue aux accents si subtils, que les enfants en furent comme envoûtés.

Quand le chant fut terminé, les fleurs hochèrent grâcieusement la tête. Après avoir pris une grande inspiration, Étincelle murmura :

« Çà fait drôle d'entendre des fleurs chanter. Je suis sûre que les oiseaux d'ici chantent pas aussi bien. »

« Les Oiseaux de Paradis ne chantent pas. » répondit l'Agent,

« C'est bizarre ! » s'exclama la fillette.

« Le pays où ils vivent est tellement rempli de musique qu'ils n'ont pas besoin de chanter, » continua le Geai, « mais voilà l'entrée juste devant nous, elle conduit dans les rameaux de ce grand arbre en or à gauche. Suivez moi, nous allons nous percher sur la branche principale. »

Sur ces mots, il fila vers l'arbre, Étincelle et Bouboule volèrent à sa suite et en quelques secondes, ils s'étaient posés sur la branche. Ils se retrouvèrent alors face-à-face avec le premier Oiseau de Paradis qu'ils voyaient de leur vie.

Son apparence et son allure étaient gracieuses, il avait à peu près la taille d'un pigeon. Ses yeux étaient perçants, mais ils avaient une expression bienveillante, et il regardait les nouveaux venus avec une certaine sympathie. Mais les enfants ne prêtaient pas attention à ces détails, ils étaient captivés par son magnifique plumage. Son corps était tellement lisse qu'il donnait l'impression d'une surface unie, son cou et ses ailes étaient d'un vert émeraude scintillant qui s'éclaircissait sur sa poitrine jusqu'à une pure blancheur. Ses ailes étaient noires avec les pointes rouge vif, et les plumes blanches de sa crête étaient parsemées de tâches lumineuses ressemblant à des flammèches. Mais c'étaient les plumes de sa queue qui étaient les plus spectaculaires ; elles s'étalaient en forme d'éventail, alternant des plumes d'un vert éclatant et d'autres blanches comme la neige.

« Qu'est ce qu'il est beau ! » s'écria Étincelle. En inclinant la tête, l'Oiseau répondit avec une lueur espiègle dans le regard :

« Votre admiration me flatte grandement, petite étrangère. »

« Voici une personne importante appelée le Gardien de l'Entrée du Paradis, » dit l'Agent Geai, « Seigneur Gardien, permettez moi de vous présenter deux enfants qui viennent de chez les hommes, ils ont été transformés en Alouettes par magie, et contre leur gré. Ils ne sont pas tout à fait des oiseaux, car leur tête est restée humaine, mais peu importe leur forme, ils sont gentils et innocents, et j'estime qu'ils sont dignes de côtoyer votre noble race. C'est pourquoi je vous les ai amenés pour solliciter votre hospitalité à leur égard. »

« Comment vous appelez vous, petits étrangers ? » demanda le Gardien.

« Maman m'appelle Étincelle. » dit la fillette.

« Moi, c'est Bouboule. » ajouta le petit garçon.

La Gardien se mit à regarder le Geai.

« Vous connaissez nos règles, » dit-il, « aucun oiseau de la forêt n'est admis dans notre Paradis. »

« Je sais, » répondit l'Agent, « je les attendrai ici, rien que d'apercevoir furtivement votre pays enchanté est pour moi un plaisir. »

Le Gardien acquiesça en signe d'approbation.

« Très bien, » répondit-il, « vous resterez avec moi pendant la visite. Si tous les oiseaux de la forêt étaient comme vous, mon ami, il n'y aurait aucun danger à vous accueillir chez nous. Mais ce n'est pas le cas, et les lois doivent être appliquées. Quant aux Enfants-Alouettes, je les enverrai d'abord chez le Roi, je vais convoquer le Messager Royal pour les y conduire. »

Il redressa brusquement la tête, et un tintement musical de clochettes résonna dans l'air. Les fleurs en dessous reprirent doucement le refrain, puis un autre Oiseau surgit du ciel, et vint se poser sur la branche à côté du Gardien.

Le nouveau-venu n'avait pas la même allure que l'autre. Son plumage était orange et blanc, tandis que sa crête et ses ailes étaient teintées d'un bleu éclatant. Il n'était pas aussi grand que le Gardien, et n'avait pas la même prestance. Son expression était plutôt espiègle et joviale, il poussa un sifflement de surprise aigü en voyant les étrangers.

« Mon cher Ephel, » dit le Gardien, « auriez-vous l'obligeance d'escorter ces Enfants-Alouettes auprès de Sa Majesté le Roi ? »

« Ce sera un plaisir, » répondit joyeusement Ephel le Messager, puis, se tournant vers Étincelle et Bouboule, il ajouta : « je pense que nous allons bien nous entendre pendant le trajet. »

Étincelle était trop embarrassée par toute cette politesse, elle ne put répondre tout de suite, mais Bouboule s'écria sans hésiter : « bien sûr ! », alors le Messager acquiesça gaiement et continua :

« Alors, si vous le voulez bien, allons-y. »

En déployant ses ailes dans un éclair de couleurs, il prit son vol vers le Paradis, et les enfants s'empressèrent de le suivre.

Agent geai926

1Tamia, petit rongeur vivant essentiellement sur le continent nord-américain, appelé Chipmunk en anglais, voir l'article Wikipédia sur le Tamia (NdT)

2Oiseau de Paradis, (note 1 chapitre 8) voir l'article Wikipédia sur le Paradisier (NdT).

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