L'Agent Geai - 22

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Ils examinèrent attentivement le buisson, et ils virent que leur ami disait vrai. Sur une branche haute, se trouvait une baie rouge et charnue, semblable à une canneberge¹, un peu plus bas, il y en avait une autre, plus petite, qui avait l'air un peu desséchée.

« Hourra ! » s'écrièrent joyeusement les Enfants-Alouettes, et Bouboule ajouta : « tu prends la plus grosse, Étincelle. »

« Pourquoi ? » demanda-t-elle en hésitant.

« Je crois qu'elle donne plus mal à l'estomac. » répondit-il.

« Ça me fait pas peur, » dit-elle, « mais tu crois que la petite baie te suffira ? Elle est un peu desséchée. »

« C'est pas grave, » rétorqua le Garçon-Alouette, « le Nécromancien Royal a dit de manger une baie, il a pas précisé si ça doit être une grosse ou une petite, ou si elle devait être mure ou desséchée. »

« C'est vrai, » dit la Fille-Alouette, « je mange la mienne maintenant ? »

« Le plus tôt sera le mieux. » répliqua Bouboule.

« Ne m'oubliez pas, ma petite, quand vous serez redevenue humaine. » dit tristement l'Agent Geai.

« Je ne vous oublierai jamais, » répondit Étincelle, « ni votre gentillesse, vous serez toujours notre ami. »

Cela sembla faire plaisir à l'élégant oiseau bleu, mais Étincelle était si pressée qu'elle ne put en dire plus. Elle cueillit la grosse baie mure, la mit dans sa bouche avec sa patte et s'empressa de l'avaler.

Au bout d'un moment, elle s'écria « Aïe! Ouille ! » mais ça ne faisait pas aussi mal qu'elle l'aurait cru. Sa forme se modifia rapidement et elle se mit à grandir, tandis que l'Agent Geai et Bouboule l'observaient avec anxiété en train de redevenir une petite fille, et son corps d'oiseau aux plumes grises disparut complètement.

Alors qu'elle se sentait changer, elle cria « Au revoir ! » à l'attention du Geai, mais il comprit à peine ses paroles.

« Au revoir ! » répondit-il, cependant, mais aux oreilles d'Étincelle, ça ressemblait plutôt à « Cui ! Cui ! Cui ! »

« Ça fait quoi comme effet ? » demanda Bouboule, elle le regarda avec perplexité, comme s'il parlait une langue étrangère, il avait l'air inquiet.

« Je crois que c'est mon tour de manger ma baie, » dit-il en riant, il la cueillit et la mangea comme l'avait fait Étincelle. Il cria une fois ou deux quand il ressentit les crampes produites par le fruit, mais la douleur disparut rapidement, et il se mit à grandir et à changer lui aussi.

Pas entièrement, cependant, bien qu'il eut recouvré son corps et ses jambes à leurs tailles normales, ses ailes étaient restées, et cela l'effrayait de voir que la magie n'avait pas été totalement annulée et qu'il était resté en partie oiseau.

« Qu'est-ce qu'il se passe ? » demanda Étincelle.

« Il y a quelque chose qui ne va pas ? » s'enquit le Geai.

Le petit garçon les comprenait tous les deux, bien qu'entre eux, ils ne se comprenaient plus. Il dit à Étincelle :

« Je crois que la baie n'était pas assez grosse. » Il répéta ces paroles en langage d'oiseau à l'Agent Geai, mais la fillette entendit encore : « Cui ! Cui ! Cui ! Cui ! »

« Qu'est-ce que tu vas faire ? » demanda la fillette, angoissée, « ça serait affreux si tu devais rester comme ça. »

Bouboule sentit les larmes lui monter aux yeux, il essayait de se retenir de pleurer, mais il ne pouvait pas. En battant tristement de ses petites ailes, il dit :

« Je voudrais être soit une chose soit une autre ! J'aimerais encore mieux redevenir un Enfant-Alouette et vivre dans un arbre, que de retourner à la maison comme ça. »

L'Agent Geai comprenait de dilemme, de ses yeux perçants, il examinait les buissons environnants, soudain, il poussa un sifflement perçant et bondit d'un seul coup, il revint aussitôt avec une autre Baie Amère dans le bec.

« C'est la toute dernière ! » dit il à Bouboule.

« C'est ce qu'il me faut ! » s'écria le petit garçon, soulagé, puis, sans se soucier des douleurs d'estomac, il avala goulument la baie.

Elle eut au moins un effet positif, car les ailes de Bouboule se retransformèrent rapidement en bras, comme avant sa rencontre avec la cruelle Tuxix. Mais il poussa des gémissements de temps à autre. Étincelle se doutait que deux baies étaient deux fois plus puissantes qu'une seule, et faisaient durer la douleur deux fois plus longtemps.

En regardant autour d'eux, le petit garçon et la petite fille furent étonnés de voir leur panier par terre, juste à leurs pieds. Sur une branche de l'arbre le plus proche, un oiseau bleu était perché et les regardait en silence, ils savaient que c'était l'Agent Geai, bien qu'il n'avait plus son casque ni sa matraque.

« Il commence à faire noir, » dit Étincelle, « viens, on retourne chez nous, Bouboule. »

« D'accord. »

Il ramassa le panier, et ils marchèrent quelques minutes sans rien dire.

Puis le petit garçon demanda :

« Tu as pas les jambes lourdes, Étincelle ? »

« Si, toi aussi ? »

« Oui, c'est affreux. »

FIN

¹Canneberge, plus connue sous le nom anglais "cranberry", voir l'article Wikipédia sur la canneberge (NdT).

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