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L'Agent Geai - 5

L'histoire du Loriot

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« Nous sommes vraiment heureux dans cette forêt, » dit un Loriot perché juste en face d'Étincelle, « et nous n'aurions aucune raison d'avoir peur si des hommes armés, appelés chasseurs, ne venaient pas de temps à autre pour nous massacrer. Ce sont de terribles créatures, sauvages, féroces et sans cœur. »

« Ils ont forcément un cœur, » objecta Étincelle, « sinon, ils pourraient pas vivre, il faut bien un cœur qui bat pour qu'une personne vive. »

« C'est sans doute leur estomac qui bat, » répondit le Loriot après un instant de réflexion, « parce qu'ils n'ont certainement pas de cœur et sont très méchants. Une de mes cousines, Susie Loriot, avait un mari beau et courageux, ensemble, ils avaient bâti un joli petit nid, et Susie y avait pondu quatre œufs, ils étaient si bien formés qu'elle en était très fière.

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Ils étaient près d'éclore, quand un homme apparut dans la forêt et découvrit le nid de Susie. Son mari défendit vaillament leur foyer, mais le cruel homme l'abattit et il tomba mort sur le sol. Cependant, Susie ne se résigna pas à abandonner ses œufs, et quand l'homme escalada l'arbre pour les prendre, elle poussa des cris et tenta de lui crever les yeux. En temps normal, nous autres, les Loriots, sommes très timides, vous imaginez donc à quel point Susie était terrifiée en combattant ce géant. Mais il avait un bâton à la main, avec lequel il asséna un coup violent à ma pauvre cousine, elle se retrouva projetée dans les airs et tomba inconsciente dans un buisson à quelques mètres de là.

Après cela, l'homme vola les œufs dans le nid, puis il ramassa le corps sans vie du mari de Susie et l'emmena aussi. À ce moment-là, Susie commençait à se remettre du coup qu'elle avait reçu, et quand elle vit ses œufs et le corps de son mari ainsi enlevés, en voletant péniblement, elle rejoignit l'individu à la lisière de la forêt. Là, un cheval était attaché à un arbre, l'homme l'enfourcha et s'éloigna dans la campagne. Susie le suivit à distance suffisante pour le garder en vue sans se faire remarquer.

Ils parvinrent à une grande maison, l'homme y entra et referma la porte derrière lui. Susie alla se percher dans un arbre voisin et attendit, dans l'espoir de retrouver ses êtres chers.

Les jours passèrent, aussi sinistres les uns que les autres, mais au bout d'une semaine, ma cousine remarqua qu'une des fenêtres de la maison était restée ouverte. Rassemblant tout son courage, elle y vola et heureusement, aucun des occupants n'était là.

Imaginez la surprise de Susie en voyant une multitude d'oiseaux perchés sur des branches coupées le long des murs, parmi eux, son mari, qui avait aussi fière allure qu'avant d'être tué par cet homme cruel ! Elle alla aussitôt se percher à côté de son bien-aimé.

Mon chéri ! s'écria-t-elle, comme je suis contente de te retrouver sain et sauf,  je te croyais mort. Viens, retournons chez nous dans la forêt.
Mais l'oiseau restait immobile sans répondre aux paroles de son épouse aimante. Elle donna un petit coup de bec sur le sien pour l'embrasser, mais il ne réagit pas, tout son corps était raide et froid.

Susie poussa un cri d'horreur en comprenant la vérité. Son mari était bel et bien mort, mais il avait été empaillé et placé sur la branche de manière à paraître vivant. Des petits bouts de fil de fer avaient été enfoncés dans ses pattes pour faire tenir son pauvre petit corps debout, et à sa grande horreur, Susie s'aperçut que ses yeux avaient été remplacés par des morceaux de verre ! Tous les autres oiseaux dans la pièce avaient été empaillés de la même manière, au premier regard, ils avaient l'air vivants, mais leurs corps étaient froids et muets. Ils n'étaient plus que de grossières imitations des superbes oiseaux que cet homme sans cœur avait privé de vie.

Le cœur gros, Susie voleta lentement vers la fenêtre par laquelle elle était entrée, soudain, une nouvelle angoisse la saisit, elle remarqua une grande armoire de verre contre le mur, à l'intérieur, des œufs de toutes sortes d'oiseaux étaient disposés. Ses propres œufs s'y trouvaient, à peine à quelques centimètres d'elle, mais elle en était séparée par un verre épais impossible à briser, malgré ses tentatives en se précipitant dessus plusieurs fois. 

À la fin, la pauvre Susie se résigna, elle s'envola par la fenêtre et revint dans la forêt, où elle nous raconta les horribles choses qu'elle avait vues. Nous étions incapables de la réconforter, car son pauvre petit cœur était brisé. Par la suite, elle retourna souvent à cette maison pour regarder ses œufs et son mari à travers les carreaux.

Un jour, elle ne revint pas, après avoir attendu près de deux semaines, nous envoyâmes le Geai voir ce qui lui était arrivé.

Notre Agent de Police trouva la maison dont les fenêtres étaient ouvertes. Il eut le courage d'entrer, et découvrit Susie et son époux perchés côte à côte sur une branche desséchée, leurs petits corps raides et sans vie. L'homme avait fini par attraper la pauvre épouse, réunissant les deux amoureux dans la mort.

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L'Agent Geai retrouva aussi la dépouille empaillée de son grand-père ainsi que celles de nombreux amis qu'il avait connus dans la forêt. Il était vraiment bouleversé à son retour, et depuis ce temps, nous craignons plus que jamais ces humains sans cœur. 

Étincelle soupira.

« Quelle triste histoire, » dit elle, « je sais que vous dites la vérité, mais croyez moi, tous les humains ne sont pas aussi cruels. »

« Tous ceux qui viennent dans cette forêt le sont, » répondit le Loriot d'un ton catégorique, « ils profitent de notre faiblesse pour nous tuer, alors que nous ne leur avons jamais fait le moindre mal. Si Dieu aime les oiseaux, et je pense que c'est le cas, pourquoi a-t-il créé ses pires ennemis, les humains ? »

Étincelle ne répondit pas, elle avait un peu honte.

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