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Yew, l'Île Enchantée - 13

Le Royaume caché de Twi

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Sachant qu'ils étaient enfin libres d'aller où  bon leur semblait, les voyageurs avançaient gaiement sur le chemin, prêtant peu d'attention au trajet.

« Nous allons faire face à de nouvelles aventures, » dit le Prince, « espérons qu'elles seront plus agréables que la dernière. » 

« Oh oui ! » s'exclama Nerle, « en tous cas, espérons que nous subirons plus de privations et que nous rencontrerons plus de problèmes que dans le royaume montagneux de Spor. » puis il ajouta : « en fin de compte, je regrette que vous soyez mon maître. » 

« Pourquoi ? » demanda le Prince en souriant.

« Vous avez le chic pour surmonter toutes les difficultés, du coup, votre compagnie me prive de toute chance d'être blessé. » 

« Ne vous découragez donc pas ! » s'écria Merveille, « n'ai je pas dit que d'autres aventures nous attendaient ? Il se peut que nous ne en sortions pas aussi bien que dans les précédentes. » 

« Vous avez raison, » répondit Nerle, « il faut garder espoir. » puis il demanda : « pourquoi vous arrêtez vous là, en plein milieu du chemin ? » 

« Parce que le chemin s'arrête là, » répondit Merveille, « une épaisse haie de bruyères épineuses nous barre la route. » 

Nerle regarda par dessus l'épaule de son maître, et il vit qu'une grande haie extrêmement touffue interrompait leur avance.

« Excellent, » dit il, « je pourrais essayer de forcer le passage, les bruyères me blesseraient et ce serait délicieux. » 

Nerle bondit de son cheval et se précipita vers la haie, mais au premier contact, il poussa un hurlement de douleur, et en retira ses mains ensanglantées à cause des épines.

« Bon, je crois que çà vous calmera un moment, » dit Merveille, « maintenant, suivez moi, nous allons longer cette haie pour trouver un passage nous la traverserons bien d'une manière ou d'une autre.. »

Ils chevauchèrent le long de la haie pendant des heures et des heures, mais elle ne semblait pas avoir de fin, et ils leur était impossible de traverser l'épaisse bruyère. Alors qu'ils prospectaient ainsi, la nuit finit par tomber, ils attachèrent leurs chevaux à un bosquet où ils avaient quelques brins d'herbe à brouter, puis ils s'étendirent sur le sol avec des rochers comme oreillers, ils parvinrent néanmoins à s'endormir profondément jusqu'au matin.

 

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Comme ils avaient amené des provisions avec eux, ils prirent leur petit déjeuner et se remirent à longer la haie.

Aux alentours de midi, le Prince Merveille poussa une exclamation de surprise et arrêta son cheval..  

« Qu'est ce donc ? » demanda Nerle. 

« Je viens de trouver le mouchoir avec lequel vous vous êtes essuyé les mains hier matin, et que vous avez si négligemment jeté. » répondit le Prince, « celà prouve que nous avons tourné en rond en suivant cette haie sans trouver un seul passage. »

« Dans ce cas, » dit Nerle, « nous n'avons qu'à nous éloigner de cette haie et aller ailleurs. »

« Certes non, » déclara Merveille, « cette haie renferme un pays inconnu, et je suis curieux de le découvrir. »

« Mais il n'y a pas de passage. » fit remarquer Nerle. 

« Alors nous allons en ouvrir un. Çà ne vous dit pas de souffrir un peu ? »

« Merci bien, » répondit Nerle, « mais mes mains sont encore délicieusement endolories d'hier. »

« Il faudra donc que je le fasse moi-même. » dit le Prince, alors il dégaina son épée, sur laquelle il prononça une étrange formule avant de l'utiliser pour entailler l'épaisse bruyère. 

Les ronces tombèrent rapidement sous sa lame, quand il avait coupé un gros tas de branches, Nerle les repoussait sur le côté, et le Prince se remettait à l'ouvrage.

La haie se révèlait incroyablement épaisse, seule une épée magique pouvait accomplir une telle tâche sans s'ébrécher, et seul un bras enchanté était assez fort pour tailler un bois aussi dur. Mais c'étaient justement une épée magique et un bras enchanté qui étaient à l'œuvre, et rien ne pouvaient leur résister.

Une fois les dernières branches sectionnées et écartées du chemin, les voyageurs engagèrent leurs montures par la brèche et pénétrètrent dans le pays inconnu se trouvant de l'autre côté.

Au premier regard, le paysage était magnifique, mais le Prince Merveille et Nerle durent s'arrêter pour se frotter les yeux, croyant avoir la berlue.

Devant eux, se dressaient deux arbres exactement pareils, et sous ces arbres, deux vaches en train de brouter, chacune étant l'exacte copie de sa voisine. À leur gauche, deux chalets, dont chaque porte, chaque fenêtre et chaque cheminée était semblable à celle de l'autre. Devant ces chalets, il y avait deux petits garçons en train de jouer, à l'évidence des jumeaux, car non seulement ils étaient vêtus de la même manière, mais chaque fois que l'un d'eux faisait un geste, l'autre le faisait aussi au même moment et de la même manière. Quand l'un riait, l'autre riait aussi, et quand l'un se cogna l'orteil et tomba, l'autre fit pareillement, ils s'assirent alors et se mirent à pleurer bruyamment de concert.

À ce moment, deux femmes - il était impossible de les distinguer l'une de l'autre - se précipitèrent hors des deux chalets, attrapèrent les deux garçons, secouèrent la poussière de leurs vêtements exactement de la même manière, et les firent rentrer en les tirant par l'oreille.

De nouveau, les voyageurs effarés se frottèrent les yeux, puis le Prince Merveille regarda Nerle et lui dit :

« Sur le moment, j'ai cru que je voyais double, mais il semble n'y avoir qu'un seul vous. »

« Et un seul vous, » répondit le garçon, puis il s'exclama : « regardez ! Il y a deux collines devant nous, deux chemins qui partent des chalets et les traversent, comme c'est étrange ! »

Deux oiseaux passèrent à proximité, volant en duo parfait, une paire de vaches jumelles levèrent la tête et firent meuh ! en même temps. Puis deux hommes - des jumeaux également - arrivèrent des collines par les deux chemins qui les traversaient. Ils portaient chacun un panier repas et entrèrent dans les deux chalets. Ils furent accueillis par les deux femmes qui les embrassèrent en même temps, les aidèrent à ôter leurs manteaux avec les mêmes gestes et refermèrent simultanément les deux portes.

Nerle se mit à rire, « dans quel sorte de pays avons nous atterri ? » demanda t il.

« Nous allons le savoir, » répondit le Prince, il se dirigea vers l'une des maisons, puis il cogna à la porte avec la garde de son épée. 

Les portes des deux maisons s'ouvrirent aussitôt, les deux hommes apparurent sur le seuil, et tous les deux eurent un mouvement de recul en voyant les étrangers. Les deux femmes poussèrent un cri et les deux petits garçons se mirent à pleurer. Alors les deux femmes giflèrent les deux petits garçons et les deux hommes balbutièrent : 

« Qui... qui êtes vous ? »

Leurs voix étaient exactement pareilles, chacune de leurs paroles prononcée à l'unisson. Courtoisement, le Prince Merveille répondit :

« Nous sommes deux étrangers qui se sont aventurés dans votre pays, et je ne comprends pas que notre apparence vous effraie à ce point. » 

« Vous êtes... tellement étranges ! Il n'y a que la moitié de chacun de vous ! » s'exclamèrent ensemble les deux hommes. 

« Pas si étranges que çà, » dit le Prince en se retenant de rire, « nous sommes uniques tandis que vous êtes doubles, cependant, chacun de nous est complet. »

« Complet ? Avec seulement une moitié de vous-mêmes ? » s'écrièrent les hommes, et à nouveau, les deux femmes, qui regardaient par dessus l'épaule de leurs maris, poussèrent des hurlements en voyant les étrangers, quant aux deux enfants, qui s'accrochaient tous deux de la même manière à la robe de leurs mères, ils éclatèrent en sanglots. 

« Nous ignorions que des personnes aussi bizarres que vous pussent exister ! » dirent les deux hommes, qui dévisageaient les étrangers en s'essuyant leurs deux fronts avec deux vieux mouchoirs élimés «  »

« Nous aussi ! » rétorqua le Prince, « je puis vous assurer que nous sommes aussi surpris que vous. »

Nerle se remit à rire, et d'entendre un seul des étrangers parler et un seul rire semblait les terrifier au plus haut point. Alors le Prince Merveille s'empressa de demander :

« Dites moi, je vous prie, quel est ce pays ? »  

« Le Pays de Twi. » répondirent les deux hommes de concert. 

« Ah ! Le Pays de Twi, vous m'en direz tant. Pourquoi fait il si sombre ? » continua le Prince. 

« Sombre ? » répétèrent les hommes d'un ton surpris, « c'est le crépuscule, voyons. »

« Évidemment, » dit Nerle, « j'aurais dû y penser. Nous sommes dans le Pays caché de Twi, dont tout le monde a entendu parler mais que personne n'a jamais vu. »

« Qui donc êtes vous ? » demanda le Prince, en regardant tour à tour les deux hommes avec curiosité. 

« Nous sommes des Twis. » répondirent ils. 

« Des Twis ? Qu'est ce donc ? » 

« Les Twis sont les habitants de Twi. »  

« C'est drôle, » remarqua Nerle en riant, « tout est en double dans ce pays. »

 

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« Aucun d'entre vous n'est donc seul ? » demanda le Prince Merveille «  »

« Seul ! » s'exclamèrent les hommes d'un air perplexe, « nous ne comprenons pas. »

« Êtes vous tous en double ? N'avez vous personne parmi vous qui ne soit qu'un ? » dit le Prince, qui avait bien du mal à formuler sa question de manière compréhensible. 

« Que signifie un ? » demandèrent les hommes, « il n'existe aucun mot comme un dans notre langue.. »

« Ils n'ont pas besoin de ce genre de mot. » fit remarquer Nerle.

« Nous ne sommes que de pauvres travailleurs, » expliquèrent les hommes, « mais de l'autre côté des collines, se trouvent les cités de Twi, où vivent le Ki et le Ki-Ki, ainsi que le Grand Ki. »

« Ah ! » dit Merveille, « j'ai déjà entendu parler de votre Grand Ki, qui est il exactement ? »

Les hommes secouèrent la tête en même temps de la même manière.

« Nous n'avons jamais vu le glorieux Grand Ki, » répondirent ils, « il est interdit de voir ses visages. Nul, hormis le Ki et le Ki-Ki n'ont jamais vu les dirigeants suprêmes ni le Grand Ki. »

« Je suis dans la confusion la plus totale, » dit Nerle, « toutes ces histoires de Ki, de Ki-Ki et de Grand Ki me font tourner la tête. Allons donc voir cette cité par nous-mêmes. »

« C'est une bonne idée, » répondit le Prince, « au revoir, mes amis. » ajouta-t-il en s'adressant aux hommes.

Ils s'inclinèrent tous deux, et bien qu'ils paraissaient terrifiés, ils répondirent poliment en usant des mêmes mots avant de refermer leurs portes en même temps.

Le Prince Merveille et Nerle arpentèrent le double chemin vers les collines, deux vaches eurent peur d'eux et se sauvèrent en courant d'un pas bien synchronisé; Une fois arrivées à bonne distance, elles s'arrêtèrent toutes deux, regardèrent par dessus leurs épaules droite et firent meuh ! en même temps.

 

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