La Clef-Maîtresse - 14

Turcs et Tatars

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The master key 14 1

Les Tatars étaient arrivés en silence, Rob était maintenant entouré d'une dizaine de cavaliers.

Sa condition désespérée avait attiré leur attention, ils le libérèrent de ses liens le questionnèrent dans leur langue, mais il secouait la tête en faisant signe qu'il ne comprenait pas, alors ils le conduisirent à leur chef, un grand homme barbu, représentant de la tribu des Kara-Khitai1, les terribles et implacables Tatars noirs du Tibet. Cet immense gaillard, qui trônait majestueusement sur un chameau noir de jais, était vêtu d'une longue robe brodée d'or et de joyaux.

Dans des circonstances ordinaires, Rob eût été paralysé de peur devant ce guerrier à l'allure farouche et au regard sombre, mais après tous les déboires qu'il venait de subir, il n'éprouvait pour lui que de l'indifférence.

Le Tatar n'avait pas l'air de considérer Rob comme un ennemi, au contraire, il le voyait plutôt comme un allié, du fait que les Turcs l'avaient ainsi ligoté.

Voyant qu'il était impossible de communiquer, Rob adopta le langage des signes. Il retourna ses poches, montra les marques de la corde sur ses poignets, puis il agita le poing en direction de la ville.

Le Tatar aquiesça gravement, puis il donna un ordre à ses hommes.

Les guerriers étaient en train de dresser le camp devant les murailles de Yarkand, en préparation d'un siège. Comme ils en avaient reçu l'ordre, ils mirent une tente à sa disposition, lui donnèrent en plus une paire de pistolets à la crosse incrustée de cuivre, ainsi qu'une dague pointue à la lame en zig-zag. C'était de toute évidence pour aider le garçon à combattre les Turcs, et il en fut très heureux. En se voyant ainsi entouré d'alliés, il retrouva le moral. Pourtant, ses nouveaux camarades avaient, pour la plupart, de si vilaines têtes, qu'il n'était pas nécessaire d'utiliser le Révélateur de Personnalité pour en deviner la nature.

« Il faut pas que je fasse le difficile, » se dit il, « au moins, ils n'ont pas essayé de me tuer comme l'ont fait les Turcs. Pour le moment, je vais rester avec leur chef, et essayer de retrouver les crapules qui m'ont volé. Si notre camp gagne, je pourrai peut être reprendre une partie de mon bien. Les chances sont minces, mais c'est mon seul espoir. »

Le soir même, Rob eut l'opportunité de se couvrir de gloire auprès de ses nouveaux amis. Juste avant le coucher du soleil, les portes de la cité s'ouvrirent soudainement, les Turcs surgirent en masse, montés sur des chevaux et des chameaux, et se jetèrent sur leurs ennemis. Les Tatars, qui ne s'attendaient pas à cet assaut, n'eurent pas le temps d'organiser une défense, et ils se retrouvèrent engagés dans un corps à corps désespéré. Cependant, les Turcs n'eurent pas l'avantage, car les agiles Tatars se glissaient sous leurs montures pour les éventrer, ce qui faisait tomber à la fois l'animal et le cavalier.

Au premier assaut, Rob tira avec son pistolet sur un Turc, le blessant si gravement qu'il tomba de son cheval. Aussitôt, le garçon se saisit de la bride, monta en selle et plongea sans hésiter au cœur de la bataille. Les balles et les coups pleuvaient sur lui de toutes parts, mais grâce à l'Habit de Protection, il s'en tira sans une seule égratignure.

Quand il eut déchargé ses pistolets, il se saisit du manche cassé d'une lance, et il s'en servit comme d'un gourdin, avec lequel il fit autant de ravage qu'il put dans les rangs adverses. Les Tatars l'acclamaient en le suivant, quant aux Turcs, ils étaient tellement stupéfaits de le voir insensible à leur balles, qu'ils furent pris de terreur, pensant qu'il portait une sorte de charme ou que des pouvoirs invisibles le protégeaient.

Cette terreur fit prendre un nouveau tournant à la bataille, et l'ennemi ne tarda pas à battre en retraite et se réfugier derrière les portes qu'ils fermèrent solidement derrière eux. Pour éviter une nouvelle sortie, les Tatars s'attroupèrent devant, ainsi, si les Turcs les ouvraient à nouveaux, ils seraient obligés de les laisser entrer pour les affronter.

Pendant qu'on démontait les tentes, Rob en profita pour fouiller le champ de bataille, il recherchait les corps des trois Turcs qui l'avaient volé, mais il ne les trouva pas.

« Ces types étaient trop lâches pour se battre. » se dit il. Il se sentait vulnérable sans son Tube Électrique et sa Machine à Voyager.

Le chef des Tatars fit venir Rob à sa tente, et en remerciement de ses services, il lui offrit un superbe anneau serti d'un rubis cœur-de-pigeon étincelant. Le garçon fut très fier de recevoir ce cadeau, et il lui dit :

« C'est sympa, mon vieux, même si tu as l'air d'une crapule. Si tu arrives à prendre cette ville et que je peux récupérer mes affaires, je t'en serai reconnaissant toute ma vie. »

Le chef pensa que ce discours exprimait la gratitutde, et il s'inclina solennellement.

La nuit qui suivit le premier engagement entre les Turcs et les Tatars, le garçon resta éveillé pour réfléchir au moyen de s'emparer de la ville. Les murailles étaient trop hautes et épaisses pour être escaladées ou abattues, et les Tatars ne possédaient pas d'artillerie. De l'autre côté se trouvait la partie la plus fertile de l'oasis, fournissant aux assiégés eau et nourriture, tandis que les assiégeants dépendaient de l'eau et de la nourriture qu'ils avaient amenées.

Peu avant l'aube, Rob quitta sa tente pour aller inspecter la muraille. Les étoiles donnaient beaucoup de lumière, mais avec inquiétude, il s'aperçut qu'il n'y avait ni gardes ni sentinelles, selon la coutume orientale, et les Tatars dormaient profondément..

La cité était également plongée dans un profond silence. Mais alors que Rob s'apprêtait à retourner dans sa tente, il vit une tête surgir en haut de la muraille, et il reconnut l'un des Turcs qui l'avaient volé.

Voyant que personne n'était réveillé, hormis le garçon, il s'assit en laissant pendre ses jambes, et il sourit méchament à son ancienne victime. Rob le regarda avec une rage contenue.

Après avec fait quelques mouvements incompréhensibles, le Turc sortit le Tube Électrique de sa poche, puis il désigna alternativement le garçon et l'instrument, comme pour lui demander à quoi il servait. Rob secoua la tête. Le Turc retourna plusieurs fois l'objet dans ses mains, l'examinant attentivement, puis il secoua la tête à son tour d'un air perplexe.

Le garçon bouillait d'impatience, il tenait à récupérer sa précieuse arme, et à tout moment, il craignait que le Turc n'en découvre le fonctionnement. Il désigna le Tube et tenta de dire, par geste, qu'il allait lui montrer comment s'en servir. L'homme semblait comprendre, mais il ne voulait pas se séparer de l'instrument.

Rob était au bord du désespoir quand il se souvint du rubis que lui avait donné le chef. Il le retira de son doigt, et il lui fit signe qu'il voulait l'échanger contre le tube.

L'idée avait l'air de plaire au Turc qui acquiesça plusieurs fois en tendant la main. Rob n'avait que très peu confiance en lui, mais il aspirait tellement à récupérer son instrument qu'il décida de prendre le risque. Il lança l'anneau en haut du mur, le Turc le rattrapa adroitement, mais quand le garçon tendit la main pour recevoir le Tube, le scélérat lui rit au nez et se dressa pour partir, cependant, le hasard voulut que le Tube lui échappe des mains et tombe au pied du garçon.

Le voleur se retourna. Alors, pris d'une colère soudaine, Rob ramassa l'arme, la pointa sur son ennemi et pressa le bouton. Sans un cri, le Turc vint s'écrouler à ses pieds.

Son premier réflexe fut de fouiller les poches de sa victime, et à sa grande joie, il retrouva sa boite de Pilules Nutritives. La Chronique des Évènements et la Machine à Voyager étaient sûrement en possession des autres voleurs, mais Rob ne désespérait pas de les récupérer, maintenant qu'il avait le Tube.

À présent, le jour se levait, plusieur Tatars arrivèrent et examinèrent le corps du Turc avec des exclamations de surprise, car il n'avait aucune blessure, et ils se demandaient commet il avait été tué. Comme ils le croyaient mort, il le jetèrent sur le côté et l'oublièrent.

Rob avait récupéré son rubis, il se rendit à la tente du chef, le montra au garde, et celui ci le laissa aussitôt entrer. L'homme à la barbe noire était encore allongé sur ses coussins, le garçon s'inclina devant lui et il lui demanda, par gestes, qu'il voulait qu'une bande de guerriers l'accompagne pour attaquer la ville. Le chef n'avait pas l'air convaincu, ne sachant comment le garçon comptait réussir, mais il lui fournit grâcieusement ce qu'il avait demandé. Quand Rob se rendit à la porte de la cité, il trouva toute une troupe de Tatars venus l'assister, tandis que le reste du camp observait, attendant de voir ce qui allait se passer.

Le garçon n'avait que faire du conflit qui opposait les Turcs et les Tatars. En temps ordinaire, il aurait refusé de prendre parti pour les uns ou pour les autres, mais il savait que pour retrouver ses appareils électriques, il devait compter sur les guerriers avec qui il avait lié amitié, et il était déterminé à leur ouvrir le passage.

Sans aucune hésitation, il s'avança vers les portes et en fit sauter le verrou avec son Tube Électrique. Puis il appela ses amis les Tatars à la rescousse, alors ils se ruèrent tous ensemble sur les portes et les ouvrirent d'un seul coup.

Les Turcs s'étaient attendus à des ennuis en entendant la fermeture voler en éclats, aussi, s'étaient ils rassemblés devant l'entrée. Les Tatars franchirent les portes en masse, ils furent accueillis par une grêle de balles, de lances et de flèches, qui firent des victimes parmi eux. Beaucoup furent tués sur le coup, d'autres, qui étaient simplement blessés furent piétinés par ceux qui arrivaient derrière.

Rob maintenait sa position en première ligne, protégé par son Habit. il prit une part active à la bataille, pressant le bouton de son Tube Électrique encore et encore, faisant tomber les ennemis en tas de parts et d'autres. Ni les chevaux ni les chameaux ne furent épargnés par l'implacable courant.

Les Tatars poussèrent des cris de joie en assistant à ces prodiges, ils se ruèrent pour l'assister dans ce massacre, mais le garçon leur fit signe de reculer, il ne voulait pas plus d'effusion de sang que nécessaire. De plus, il savait que les piles de Turcs inconscients allaient bientôt revenir à la vie,

Alors il se tint seul face à l'ennemi, les assommant à mesure qu'ils arrivaient. Deux Turcs parvinrent à se glisser derrière lui, l'un d'eux, qui maniait un immense cimeterre à double-lame aussi tranchant qu'un rasoir, tenta de décapiter Rob. Mais la force répulsive de l'Habit était telle que l'arme vola en arrière avec une vitesse redoublée, et elle frappa le deuxième Turc à la taille, le coupant littéralement en deux.

Dès lors, ils évitèrent de s'approcher du garçon, et en un temps incroyablement court, les Turcs furent vaincus, la plupart réduits à l'inconscience, à l'exception de quelques poltrons qui étaient partis se cacher dans les caves ou les greniers de leurs maisons.

Les Tatars pénétrèrent dans la ville avec des cris de triomphe, le chef était tellement heureux qu'il prit Rob dans ses bras et l'embrassa chaleureusement. Puis commença le sac de Yarkand, les féroces guerriers pillèrent les bazars et les maisons, s'emparant de tous les biens de valeurs qu'ils trouvèrent.

Rob rechercha les deux hommes qui l'avaient volé parmi les corps de Turcs inconscients, mais il n'en trouva aucun. Peu après, il eut plus de chance, il vit une bande de Tatars trainant un homme par une corde attachée à son cou, le garçon reconnut immédiatement l'une des canailles. Les Tatars le laissèrent volontiers le fouiller, et dans l'une de ses poches, il retrouva la Chronique des Évènements.

Il avait presque recouvré tous ses biens, à l'exception de la Machine à Voyager, la chose la plus indispensable pour échapper à ce pays barbare.

Il continua ses recherches, et une heure plus tard, il trouva le cadavre du troisième voleur étendu sur la place centrale de la cité. Malheureusement, la Machine à Voyager n'était pas sur lui, alors, pour la première fois, le garçon commença à se laisser aller au désespoir.

Soudain, il entendit des cris au loin, suivis de bruit de lutte ; les Turcs étaient en train de reprendre conscience et commençaient à se retourner contre les Tatars. Ces derniers s'étaient éparpillés à travers toute la ville, se croyant en sécurité, aussi, non seulement ils n'étaient pas préparés à combattre, mais ils furent saisis de panique en croyant voir leurs ennemis revenir des morts. Leur courage habituel les abandonna, et ils s'enfuirent dans toutes les directions, tombant directement sous les cimeterres vengeurs de leurs adversaires.

Rob était assis sur le rebord d'une fontaine en marbre, au centre de la place, quand une foule de Turcs victorieux apparut et se mit à l'encercler. Le garçon ne prêtait guère attention à leurs gesticulations. Ils évitaient de trop s'approcher de lui, mais tout en gardant leurs distances, ils lui tirèrent des rafales de balles avec leurs fusils et leurs pistolets.

Rob les regarda d'un air méprisant. Voyant qu'ils n'arrivaient pas à le tuer ni même le blesser, les Turcs renoncèrent, mais ils l'entouraient toujours, et la foule devenait plus nombreuse à chaque instant.

Les femmes sortirent en rampant de leurs cachettes, et elles vinrent se mêler aux hommes. À leurs joyeuses exclamations, Rob devina que les Turcs avaient reconquis leur cité, et qu'ils avaient chassé ou tué les Tatars. Cela ne changeait rien à sa situation, puisqu'il ne pouvait s'enfuir de l'oasis.

Soudain, quelque chose attira son attention dans la foule, une jeune fille était en train d'attacher un objet au poignet d'un Turc à la mine patibulaire. Le garçon aperçut un éclat de lumière qui lui rappela sa Machine à Voyager, mais l'homme et la fille baissèrent la tête pour regarder l'objet, si bien qu'ils disparurent de sa vue.

Aussitôt, Rob se leva et avança dans leur direction, la foule s'écarta de lui, mais l'homme et la fille ne le remarquèrent pas. Il n'était plus qu'à quelques pas d'eux, quand la fille mit ses doigts sur l'aiguille du cadran.

The master key 15

À son grand désarroi, Rob vit le Turc s'élever doucement dans les airs, tandis que la foule poussait un cri d'effroi. Mais le garçon parvint à sauter et attraper ses pieds. Il s'y accrocha désespérément, tandis qu'ils montaient tous les deux de plus en plus haut au dessus de la cité du désert.

Le Turc poussa un hurlement déchirant avant de s'évanouir. Rob avait très peur, s'il lâchait prise, il ferait une chute mortelle. Déjà, une de ses mains glissait, il fit un effort frénétique pour s'accrocher au pantalon bouffant de l'homme, puis, lentement, il se hissa et agrippa sa ceinture de cuir. Ayant ainsi assuré une meilleure prise, il reprit son souffle.

À présent, il était accroché au Turc, l'entourant de ses jambes comme s'il escaladait un arbre chez lui pour cueillir des cerises. Après avoir maîtrisé sa peur du vide, il prit le temps de retrouver ses esprits et ses forces.

Ils avaient à présent atteint une telle altitude que la cité n'était plus qu'un point dans le désert. Il savait qu'il devait faire vite, il attrapa le bras gauche du Turc inconscient où était ajustée la Machine à Voyager, il avait peur de la détacher, d'abord à cause du risque de la faire tomber et qu'ils plongent tous deux vers une mort certaine, mais aussi parce qu'il n'était pas sûr que la machine fonctionnerait si elle n'était pas fixée à un poignet. 

Rob décida de ne pas courir de risque, alors il laissa la machine attachée au Turc, et il tourna l'aiguille du cadran sur zéro, puis sur l'est, car il ne souhaitait pas retourner auprès des Turcs ni des Tatars.

Après quelques minutes de trajet, il perdit la cité de vue, alors, toujours accroché au corps du Turc, il tourna l'aiguille du cadran vers le bas et il se mit à descendre. Quand ils se posèrent enfin sur une éminence rocheuse des montagnes de Kuen-Lun2, le garçon était pratiquement à bout de forces, et il commençait à avoir des crampes dans les membres à force de s'agripper à l'homme.

La première chose qu'il fit, ce fut de transférer la Machine à Voyager sur son propre poignet, et de vérifier que les autres intruments électriques étaient encore dans ses poches. Puis il s'assit sur un rocher pour se reposer jusqu'à ce que le Turc se réveille.

Le gaillard se mit à remuer, se redressa sur son séant et regarda autour de lui. Il croyait sans doute rêver, car il se frotta les yeux et regarda encore avec une expression médusée. Puis, en voyant Rob, il poussa un cri sauvage et sortit sa dague.

Le garçon lui fit un sourir en le visant avec son Tube Électrique, l'homme sembla reconnaître l'instrument et se souvenir de son pouvoir, car il se renfrogna et recula en tremblant.

 « Cet endroit a l'air de se trouver loin de toute civilisation, » remarqua Rob, d'un air aussi décontracté que si son compagnon pouvait comprendre, « mais tu as de bonnes jambes, tu seras capabe de t'en sortir. Bien sûr tu risques de mourir de faim, dans ce cas, ce ne sera pas de ma faute. »

Le Turc le regardait d'un air maussade sans essayer de répondre.

Rob sortit sa boîte de Pilules de sa poche et en offrit une à son ennemi. Le gaillard accepta d'assez mauvaise grâce, mais en voyant le garçon avaler la sienne, il décida de suivre son exemple, et il avala la pilule d'un air méfiant.

« C'est bien ! » s'écria Rob en riant, « tu t'es épargné les souffrances de la faim pour un moment, je peux te quitter avec la conscience tranquille. »

Sans autre forme de cérémonie, il tourna l'aiguille du cadran et monta dans les airs, laissant le Turc assis là, sur les rochers, en train de le regarder s'éloigner d'un air effaré.

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1 Les Kara-Khitai, Khara-Khitans ou Qara Khitaï (Khitans noirs) sont une branche du peuple proto-mongol des Khitans qui avait créé en Chine la dynastie des Liao (907-1125) (NdT).

2 Baum veut parler de la cordillère de Kunlun (NdT). 

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