Contes de Fées Américains - Supplément 3

La sorcellerie de Mary-Marie (Édition de 1908)

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Witchcraft 3

Mary-Marie avait besoin de travailler, sa mère était morte depuis quelques années et le roi, qui était cruel, avait enrôlé son père dans l'armée royale pour l'envoyer se battre dans un pays lointain.

Un jour, alors qu'elle était assise sur le seuil de sa maison, un vieux voyageur vint à passer et l'aborda. La jeune fille lui apporta un verre d'eau et en réponse aux  questions de l'étranger, elle lui raconta à quel point elle se sentait seule et misérable.

"Que puis je faire ?" se lamentait elle en écartant les bras d'un air impuissant, "je ne sais pas abattre les arbres comme le faisait mon père, en plus, dans cette région du domaine royal, il y a tellement de bergers qu'on n'en embauche plus, et tellement de laboureurs qu'ils n'arrivent plus à trouver de travail. J'ai cherché partout, mais personne ne veut embaucher une faible jeune fille comme moi."

"Pourquoi ne devenez vous pas sorcière ?" lui suggéra l'homme.

"Moi ?" s'exclama Mary-Marie stupéfaite, "une sorcière ?"

"Pourquoi pas ?" demanda son interlocuteur d'un air surpris.

La jeune fille se mit à rire.

"Voyons, je suis trop jeune," dit elle, "et comme vous savez, les sorcières sont toutes de vieilles mégères ridées et desséchées."

"Pas du tout !" rétorqua l'étranger.

"En plus, elles vendent leur âme à Satan pour obtenir leurs connaissances en sorcellerie." continua Mary-Marie d'un ton plus grave.

"C'est absurde !" s'écria l'homme, irrité.

"Elles passent toutes leurs nuits à voler sur des balais." affirma-t-elle.

"Eh bien," dit le vieil homme d'un air consterné, "à vous entendre parler, on croirait que vous savez tout sur les sorcières, mais vous avez tort, vous ignorez tout à ce sujet. Dans le monde, il y a de bonnes et de mauvaises personnes, il y a aussi des bonnes et des mauvaises sorcières, pour ma part, j'en ai connu de très respectables, qui étaient renommées pour leurs bonnes actions."

"J'aimerais bien être ce genre de sorcière !" s'écria Mary-Marie en joignant les mains.

"C'est facile," répondit l'étranger, "à cinq ou six kilomètres d'ici, je suis passé devant la chaumière d'une sorcière, sur sa porte il y avait un panneau qui disait : Apprenez la sorcellerie grâce aux méthodes d'enseignement moderne. Si j'étais vous, mon enfant, je me rendrais à cette chaumière pour apprendre à devenir sorcière, ainsi çà vous occuperait et vous seriez heureuse."

Sur ces mots, le voyageur se leva et reprit sa route vers la montagne, Mary-Marie le regarda s'éloigner jusqu'à ce qu'il eut disparu, puis elle se mit debout et emprunta le chemin dans la direction opposée en se disant :

"Je vais aller à la chaumière de cette sorcière, si j'arrive à la convaincre de me donner des leçons gratuites, j'apprendrai son art et deviendrai moi-même une sorcière."

Tout en chantant et en dansant sur le trajet, elle marcha près deux heures pour faire les cinq kilomètres qui la séparaient de la chaumière dont lui avait parlé l'étranger.

Elle frappa à la porte qui s'ouvrit d'un seul coup sur une vaste pièce aux murs et au plafond d'un blanc immaculé, pour seul meuble, il n'y avait qu'un fauteuil blanc près de la fenêtre, une femme au visage doux aux cheveux blancs comme la neige y était assise, ses vêtements étaient si propres que la jeune fille était sûre qu'ils sortaient de chez le blanchisseur. Devant l'expression bienveillante de la femme, Mary-Marie fit une révérence, comme il convenait, et attendit dans une attitude humble.

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"Entre, Mary-Marie." lui dit gentiment la femme.

"Bien sûr, elle connait mon nom." se dit la jeune fille.

"Oui, et je sais pourquoi tu es venue." continua la sorcière, à peine Mary-Marie eut formulé cette pensée, comme si elle l'avait lue en elle.

"Alors vous savez que je n'ai pas d'argent pour payer vos leçons" dit la jeune fille.

"Il existe d'autres moyens que l'argent pour payer," dit la femme en souriant, "je vais donc te prendre comme élève et t'apprendre à devenir une sorcière, je crois que tu es particulièrement douée pour exercer cette profession, de plus, tu es jeune et belle, ce qui est rare. La sorcellerie est un grand art par trop négligé de nos jours."

La dame aux cheveux blancs se tut et poussa un soupir. Troublée par ces paroles, Mary-Marie demanda timidement :

"Payer sans argent, est ce que çà signifie que je dois vendre mon âme à Satan ?".

"Pas du tout !" rétorqua la sorcière, "ni à moi ni à quiconque, tu ne seras une mauvaise sorcière mais une bonne, tu utiliseras ton art pour le bien de l'humanité."

"Alors je vais prendre ma première leçon tout de suite !" s'écria la jeune fille avec impatience.

"Un moment," dit la femme, "avant de commencer, nous devons conclure un marché, tu dois me promettre d'accomplir trois tâches en règlement de mon enseignement."

"Très bien," répondit Mary-Marie, "si j'en suis capable."

"Tu le seras quand tu seras une sorcière," affirma la vieille dame,

D'un geste de la main elle fit apparaitre un fauteuil blanc en face du sien. la jeune fille y prit place et eut sa première leçon, puis les autres les jours suivants. Elle s'appliqua à apprendre l'art de la sorcellerie et se mit à apprécier son professeur de plus en plus. 

Elle était si douée, elle connut rapidement tous les secrets de cette discipline. Le jour vint où elle en sut autant sur les arts magiques que la sorcière, alors celle ci lui dit :

"Ton apprentissage est terminé, demain tu devras te mettre en route pour ton voyage."

"Quel voyage ?" demanda son élève.

"Celui où tu accompliras tes tâches, celles que tu as promis de réaliser pour moi." répondit la vieille femme.

"Je suis prête." déclara la jeune fille.

"Alors écoute attentivement mes instructions," dit la sorcière en approchant son fauteuil du sien, "il faudra d'abord te rendre au palais du roi."

Mary-Marie jeta un regard sur sa robe rapiécée en soupirant.

"Tu te présenteras comme la princesse Pritikin d'Aurissau en visite officielle. Le roi Gruph ne l'a jamais vue, il te recevra donc courtoisement, et avant qu'il ne découvre la supercherie, tu auras eu le temps d'accomplir ta mission."

"En quoi consistera elle ?" demanda la jeune fille.

"J'y arrive," répondit la sorcière, "mais d'abord, que sais tu sur le roi ?"

"Très peu," dit Mary-Marie, "on dit qu'il est cruel et sans pitié, je crois que c'est vrai, car il a envoyé mon pauvre père à la guerre. On dit aussi que ses colères sont terribles, et qu'il tue les serviteurs qui l'ont contrarié de ses propres mains."

"Tout cela est vrai," répondit la vieille dame d'un ton grave, "c'est d'autant plus insupportable que ce n'est pas notre roi légitime."

"En effet, tout le monde sait que le prince Melra aurait dû s'asseoir sur le trône de son père au lieu de son oncle Gruph. Mais le prince a disparu, on dit que c'est son oncle qui l'a fait tuer pour devenir roi." dit la jeune fille en baissant la voix.

"Eh bien ta première tâche consistera à t'approcher suffisamment du roi Gruph pour lui jeter un sort," continua la sorcière, "tu le transformeras en chèvre."

Mary-Marie se mit à rire.

"Comme se sera drôle de voir cet affreux roi sautiller comme un cabri !" s'écria-t-elle.

Mais la vieille dame ne riait pas, elle avait l'air préoccupée.

"Ma première tâche sera plutôt facile," reprit plus sérieusement la jeune fille, "que devrai-je faire ensuite ?"

"Tu devras t'enfuir avec la chèvre, traverser les montagnes avec elle et la conduire à la cité de Ribdil."

"Ce sera difficile ?" demanda Mary-Marie.

"Pas pour une sorcière," répondit la femme, "bien que le commun des mortels aurait du mal à trouver son chemin dans ces montagnes sauvages. Ta troisième tâche consistera à vendre la chèvre à un boucher nommé Gurd installé aux portes de la cité. Dès qu'il l'aura tuée, tu te dépêcheras de revenir ici. Après, tu feras ce que tu voudras car tu auras payé ta dette envers moi pour t'avoir enseigné la sorcellerie."

La jeune fille n'était pas très enthousiaste à l'idée d'accomplir ce que lui demandait la sorcière, car elle avait bon cœur et voulait exercer la sorcellerie pour le bien de ses semblables, mais étant tenue de remplir sa promesse, elle se contenta de répondre :

"Très bien, je me mettrai en route dès demain."

Le jour suivant, un magnifique carrosse escorté de gardes en uniforme arriva au palais royal, c'était Mary-Marie, dont la robe somptueuse lui donnait toute la dignité d'une véritable princesse.

"Faites place à la princesse Pritikin d'Aurissau !" criait l'un des gardes sur son passage, le cortège était si imposant que tout le monde s'inclina, y compris le roi Gruph, qui descendit en personne les marches de marbre du palais pour accueillir la princesse.

Deux pages tenaient la traîne de son manteau de soie, tandis que le souverain la menait à la salle de banquet.

Elle écouta de la musique, regarda les danseurs et les jongleurs jusque très tard dans la nuit, la plupart des courtisans et des serviteurs s'étaient endormis sur leurs sièges, seul le roi était resté parfaitement éveillé et fixait la soit disant princesse d'un air sombre, comme s'il soupçonnait la véritable raison de sa présence.

Mary-Marie, qui avait remarqué ce changement d'humeur, décida de ne pas perdre plus de temps, elle sortit discrètement un épingle d'argent de son corsage, se pencha vers lui, comme pour lui parler et le piqua légèrement à l'épaule.

La large silhouette du roi diminua aussitôt et il tomba sur les marches du trône avec un claquement de sabots et un bêlement effrayé. Il se tenait à présent sur quatres pattes et regardait Mary-Marie d'un air terrifié.

Le bruit réveilla les courtisans assoupis qui se frottèrent les yeux pour voir ce qu'il se passait, ils s'aperçurent alors que le roi et la princesse avaient disparu, ils ne virent qu'une jeune fille vêtue de haillons qui sortait de la salle, tenant une chèvre avec une corde attachée à sa patte.

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Le carrosse de la jeune sorcière et ses serviteurs avaient disparu depuis longtemps, il lui fallait trouver un chemin conduisant aux montagnes et entamer la deuxième partie de son voyage, tirant la chèvre à ses côtés en se dirigeant prudemment à la lumière de la lune.

Le chemin montait de plus en plus et à la longue, elle parvint au bord d'un profond ravin. Mary-Marie attacha la chèvre à un rocher, s'allongea sur le sol et dormit jusqu'au lever du jour.

Au matin, elle arracha quatre longs poils du dos de l'animal, puis, après les avoir tressés ensemble, elle lança un bout de l'autre côté du ravin en murmurant un formule magique. Aussitôt, un pont magnifique apparut, reliant les deux bords du gouffre, la jeune fille put ainsi le traverser en sûreté en menant la chèvre devant elle.

Une fois parvenue de l'autre côté, elle reprit son voyage, en parvenant auprès du pic le plus élevé de la montagne, elle rencontra un géant imposant qui lui barrait la route.

"Halte !" rugit il d'une voix terrible, "on ne passe pas !"

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La petite sorcière agita simplement la main et un épais nuage de poussière vola dans les yeux du géant. Aveuglé, celui ci lâcha son gourdin et se mit à se frotter les yeux en hurlant de douleur. Mary-Marie éclata de rire et dit à la chèvre :

"Comme ce tour est facile quand on sait comment faire !"

Puis elle s'éloigna du géant avec l'animal et descendit le flanc de la montagne sans prêter attention à ses vociférations.

Elle rencontra rencontra bien d'autres difficultés, mais elle parvint à toutes les surmonter grâce à sa maîtrise des arts magiques. Elle arriva finalement à la cité de Ribdil, en franchissant ses portes, elle aperçut un boucher aux allures de brute qui se tenait devant son échoppe en regardant les passants d'un air renfrogné.

"Êtes vous Gurd ?" lui demanda Mary-Marie.

"C'est bien moi !" répondit le boucher en la fusillant du regard, "qu'est ce que tu veux ?"

"De l'argent contre ma chèvre." lui dit elle.

Le boucher se saisit aussitôt de la chèvre et la traîna à l'intérieur de sa boutique, puis il se retourna vers la jeune fille et lui cria :

"Va t'en ! Pourquoi tu traînes ici ?"

"J'attends que vous me donniez l'argent pour ma chèvre." lui dit bravement Mary-Marie, en dépit de la crainte qu'il lui inspirait, grâce à sa sorcellerie, elle savait que ce Gurd, qui feignait d'être un boucher, était en réalité un puissant magicien dont les pouvoirs surpassaient les siens. Il lui fallait être assez habile pour l'affronter.

Les citoyens de Ribdil craignaient tous ce méchant homme et l'évitaient autant que possible. Gurd était convaincu que cette jeune fille, à qui il avait volé sa chèvre, serait facilement intimidable, alors il sortit un couteau pointu de sa ceinture et lui dit :

"Tu as deux minutes pour décamper, sinon je te tues avec ta chèvre."

En entendant cela, Mary-Marie eut très envie de se sauver, car elle avait conscience de courir un grand danger. Mais elle résolut de rester jusqu'à ce que sa mission fut accomplie, alors elle répondit avec hardiesse :

"Si vous ne me payez pas, j'irai me plaindre au roi."

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"Le roi, sans blague ?" fit Gurd en s'esclaffant, "crois tu que je craigne un quelconque mortel ? File pendant qu'il en est encore temps !"

Mais la jeune fille ne bougea pas, alors Gurd l'attrapa dans ses bras puissants, l'entraîna à l'intérieur de sa boutique et referma la porte derrière pour ne pas qu'elle s'échappe.

"Quand j'aurai tué la chèvre, ce sera ton tour !" cria-t-il, puis il donna un grand coup à l'animal qui s'effondra.

Mais une fois étendue au sol, la chèvre changea de forme et reprit celle du roi Gruph, qui agonisa dans râle profond aux pieds du boucher.

Gurd contempla un instant sa victime avant de pousser un cri d'horreur, sa carrure imposante se mit à diminuer et en moins d'une minute, il était devenu un vieil homme chétif et handicapé qui eut à peine la force de se traîner jusqu'à un banc.

"Je suis perdu ! Perdu !" se lamenta-t-il en pleurant comme un enfant, "j'ai tué le roi, il était dit que si je versais une seule goutte de son sang je perdrais à jamais mes pouvoirs magiques ! Je suis perdu ! À cause d'une fille en plus !"

Puis il releva la tête et demanda d'un ton larmoyant :

"Mais qui es tu ?"

"Je m'appelle Mary-Marie," répondit elle, "je suis une bonne sorcière."

"Qui t'a envoyée ?" gémit il.

"Une vieille femme au visage serein et aux cheveux blancs, j'ignore son nom, mais c'est elle qui m'a enseigné la sorcellerie." déclara la jeune fille.

Le vieil homme posa une main ridée sur sa figure.

"Je vois de qui tu parles," dit il dans un sanglot, "mais quand tu la reverras, ce ne sera plus une vieille femme. Va, et dis lui que tu as vengé tout le mal que j'ai fait. Dans une heure, je serai mort et les hommes n'auront plus à me craindre !"

Il s'écroula sur le sol comme un tas de chiffons, Mary-Marie sortit de la boutique, repassa les portes de la cité et s'éloigna vers les montagnes. Une fois seule, elle sortit un mouchoir rouge de son corsage et le posa par terre. Il y avait juste la place pour y poser les pieds, une fois debout sur le carré de tissu, elle prononça une formule magique que lui avait apprise son professeur.

Un coup de vent remua ses cheveux et en un instant, elle se retrouva devant la blanche chaumière de la sorcière.

Mary-Marie s'empressa de frapper à la porte, lorqu'elle s'ouvrit, elle s'écria :

"J'ai accompli vos tâches, maîtresse !"

Mais elle s'arrêta, saisie de stupeur, car au lieu de la vieille femme, il y avait un beau jeune homme dans la pièce, il était vêtu d'habits royaux et souriait en voyant sa mine étonnée.

"Entre, petite sorcière !".lui dit il d'un ton joyeux, "entre, laisse moi te remercier de m'avoir délivré et rendu mon royaume."

"Qui êtes vous ?" demanda Mary-Marie en s'étranglant.

Je suis le prince Melra, que tout le monde croyait mort. Le méchant magicien Gurd m'avait transformé en vieille femme sur l'ordre de mon oncle, le roi Gruph, qui a pu ainsi s'emparer du trône qui me revenait de droit. Après avoir souffert de cet ensorcellement pendant cinq ans, j'ai appris que si le magicien versait ne fut ce qu'une goutte du sang du roi, il perdrait tous ses pouvoirs et que je regagnerais ma liberté. C'est ainsi que je me suis mis à étudier la sorcellerie, mais je m'aperçut bien vite que le magicien surveillait mes allées et venues, il me fallait donc quelqu'un pour agir à ma place, quelqu'un en qui j'eus confiance."

"Pourquoi m'avez vous choisie ?" demanda la jeune fille.

"Je t'ai vue un jour en train de ramasser des chataîgnes dans la forêt, je t'ai aimée tout de suite pour ta beauté et ta douceur. C'est pourquoi, sous l'apparence d'un vieil homme, j'ai pris le temps de te conseiller d'aller voir la vieille sorcière pour qu'elle te donne des leçons. Puis je suis revenu ici par un autre chemin, juste à temps pour t'accueillir. Tout ce temps où je t'ai enseigné la sorcellerie, j'ai appris à t'aimer chaque jour un peu plus. Maintenant que je suis libre et que je vais récupérer mon royaume, je voudrais que tu deviennes ma reine."

"Je crois que je suis trop jeune pour me marier." dit Mary-Marie en rougissant.

"Alors il me faudra trouver une autre épouse." répondit le séduisant prince, en feignant de s'en aller.

"Mais il y a beaucoup de filles qui se marient trop jeunes," s'empressa d'ajouter Mary-Marie, "si mon âge ne vous pose pas de problèmes..."

"Pas le moins du monde !" s'écria le prince, "plus nous sommes jeunes, plus d'années de bonheur nous passerons ensemble."

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