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Yew, l'Île Enchantée - 11

La ruse du Roi Terribus

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Le Prince Merveille et Nerle passèrent plusieurs journées agréables, ils furent traîtés comme d'honorables invités, autant par le Roi que par ses courtisans, mais c'était le Prince qui était le favori de tous, à cause de son adresse dans les jeux et le combat où il excellait invariablement, et durant les soirées, quand la salle de bal était illuminée et que les musiciens jouaient des airs mélodieux, nul ne dansait plus grâcieusement que lui.

Nerle se lassa vite des jeux et des danses, il y en avait souvent dans le château de son père, il y était habitué. De plus, il était timide avec les dames, si bien qu'au bout de plusieurs semaines, il commençait à se lamenter et montrer une mine renfrognée.

Un jour, le Prince remarqua que son écuyer avait vraiment l'air déprimé, et lui en demanda la cause.

« Eh bien, » dit Nerle, « je suis parti de chez moi pour qu'il m'arrive toutes sortes d'ennuis et de problèmes, arrivé là, je retrouve la même existence monotone qu'au château de mon père. Ici, nos jours défilent dans le calme et la sérénité, il ne se passe jamais rien, jamais aucun incident d'aucune sorte. Vous êtes devenu un chevalier de salon, Prince Merveille, vous vous reposez sur vos lauriers au lieu de courir l'aventure. Alors, si vous le voulez bien me libérer de mes obligations envers vous, je partirai à l'aventure de mon côté. »

« Non, » rétorqua le prince, « nous partirons ensemble, car moi aussi, je suis las de cette vie de plaisirs. »

Le matin suivant, Merveille se présenta devant le Roi Terribus et lui dit :

« Je suis venu vous faire mes adieux, votre Majesté, car mon écuyer et moi nous apprêtons à quitter votre domaine. »

Sur le moment, le Roi se mit à rire, faisant se balancer son nez d'un côté et de l'autre. Puis, voyant que le Prince était sérieux, sa Majesté se renfrogna et commença à s'inquiéter. Alors il dit :

« Je dois vous implorer d'être mes hôtes encore un moment, personne n'était jamais venu me rendre visite, et je n'ai pas envie d'être privé de votre compagnie aussi vite. »

« Pourtant, nous devons partir. » répondit laconiquement le Prince.

« N'êtes vous pas satisfaits ? » plaida Terribus, « vous pouvez demander absolument tout ce que vous désirez et cela vous sera accordé. »

« Nous voulons vivre de nouvelles aventures dans un nouvel environnement, » expliqua Merveille, « et cela, vous ne pouvez nous l'offrir qu'en nous autorisant à prendre congé. »

Voyant que son hôte était déterminé, le Roi cessa d'argumenter et dit :

« Très bien, partez si vous voulez, j'espère seulement vous revoir parmi nous ce soir. »

Le Prince ne prêta pas d'attention particulière à ces propos, il traversa la salle et s'empressa de gagner la cour du château, où Nerle tenait les chevaux en bride, prêt au départ.

Tout autour d'eux, se tenaient des rangées d'Hommes Gris, et quand ils atteignirent la route de marbre, ils virent les géants immobiles postés de chaque côté. Mais nul ne tenta de les arrêter, bien que le Prince Merveille et Nerle fussent conscients de toutes ces paires d'yeux qui les observaient.

Bizarrement, aucun des deux ne se souvenait quelle direction ils avaient prise pour venir, car à leur arrivée, ils n'en avaient vu qu'une seule conduisant tout droit à l'entrée du château, maintenant, il y en avait plusieurs, chacune menant dans une direction différente dans les montagnes.

« La direction que nous prenons importe peu, du moment que nous nous éloignons du Royaume de Spor. » dit le Prince Merveille, il choisit donc un chemin au hasard, et peu après, ils chevauchaient dans un défilé montagneux.

Progressivement, l'expression radieuse de Nerle s'était assombrie.

« J'espérais devoir me battre pour partir, » dit il tristement, « être gravement blessé et souffrir horriblement, mais personne ne nous a retenu et nous ne sommes pas blessés, si çà tombe, le Roi Terribus est bien content d'être débarrassé de nous. »

« Il y a de quoi, » dit Merveille en riant, « il a remarqué que nous étions plus puissants que lui, s'il avait continué à s'opposer à nous, nous aurions détruit toute son armée. »

Ils chevauchèrent sur les chemins pierreux des collines, prenant une direction puis une autre, et encore une autre jusqu'à perdre tout sens de l'orientation

« Qu'importe, » dit le Prince, « tant que nous nous éloignons de cet horrible Terribus, çà me convient. »

« Peut être allons nous rencontrer des dangers encore pires, » répondit Nerle, dont le visage s'illuminait à cette idée, « l'autre jour, un géant m'a dit que, quelque part aux pieds des montagnes, se trouve le Royaume du Grand Ki de Twi. »

 « Qui est le Grand Ki de Twi ? » demanda le Prince Merveille.

 « Nul ne sait. » répondit Nerle.

 « Et à quoi ressemble les Royaume de Twi ? »

 « Nul ne sait. » répondit encore Nerle.

« Donc, » répondit le prince en souriant, « si nous avons la chance de visiter cet endroit, nous en saurons plus que n'importe qui. »

À midi, ils prirent leur repas sur le bord du chemin, Nerle avait rempli ses poches de restes du petit déjeuner qu'ils avaient pris au château. Tout autour d'eux, ce n'étaient que des fragments de roche éparpillés, le soleil tapait tellement fort que la chaleur renvoyées par les pierres était presque insupportable.

Les voyageurs ne tardèrent donc pas à finir leur repas et à se remettre en selle. Quand le soleil commença à descendre dans le ciel, les rochers au bord du chemin procurèrent aux cavaliers une ombre réconfortante qui rendit leur trajet plus agréable. Ils avançaient en prêtant peu attention au chemin, bavardant et riant gaiement jusqu'à la tombée de la nuit.

 

Chasse au faucon

 

 « Ce chemin a-t-il donc une fin ? » se demanda soudainement le Prince Merveille à voix haute,  « nous devrions bientôt atteindre un endroit habité, ou bien nous serons contraints de passer la nuit au milieu de ces rochers. »

 « Peut-être nous ferons attaquer par des loups, » dit Nerle d'un ton jovial, « et peut être nous mettront ils en pièces avec leur dents pointues et leurs griffes. »

Alors qu'il parlait ainsi, ils arrivèrent à un tournant et ce qu'ils virent leur coupa le souffle ; juste devant eux s'élevait le château du Roi Terribus, et tout le long de l'allée de marbre y conduisant, une rangée de géants était alignée de chaque côté, exactement dans la même posture qu'au matin.

Nerle se retourna sur sa selle. Comme il s'y attendait, des Hommes Gris surgissaient de derrière chaque rocher et s'attroupaient en les suivant.

 « Bien, que faisons nous ? » demanda l'écuyer,  « allons nous nous battre ? »

« Certainement pas ! » répondit le Prince Merveille, qui riait en voyant l'air impatient de son ami, « apparemment, le chemin que nous avons emprunté forme une boucle et nous a ramenés à notre point de départ. Faisons donc contre mauvaise fortune bon cœur, et passons une nouvelle nuit chez notre affreux ami, le Roi Terribus. »

Ils se rendirent au château en passant entre les rangées de géants. Toujours courtois, les serviteurs, prirent leurs chevaux en charge et les escortèrent vers leurs appartements avec toutes les marques de respect.

Nul n'avait l'air surpris de leur si prompt retour, ce qui intrigua Nerle et le rendit méfiant.

Après s'être baignés et avoir fait nettoyer leurs vêtements, ils se rendirent à la salle de banquet, où le Roi Terribus, installé sur son trône de pierre grise, les accueillit chaleureusement.

La vue de sa peau cramoisie et de son visage difforme emplit le Prince Merveille d'une vague de répugnance, aussi, au terme d'une brève réflexion, il tendit la main vers Terribus et murmura un mot magique que nul n'entendit autour de lui.

Nerle ne remarqua ni le geste discret du Prince ni le mot magique qu'il avait prononcé tout bas, à ce moment là, il était en train de fixer Terribus, et à sa grande surprise, il vit l'œil du haut de son crâne decendre vers son front et celui du centre de son front glisser légèrement vers la gauche, en même temps, son nez semblable à une trompe d'éléphant raccourcit sensiblement. Il lui sembla aussi que la peau du Roi n'était plus aussi cramoisie qu'avant, et qu'un léger duvet de cheveux commençait à recouvrir sa tête. 

Cependant, personne d'autre n'eut l'air de remarquer ces changements, pas même Terribus, alors Nerle s'assit à table et se mit à manger.

« C'est très gentil de votre part de revenir me voir dans mon humble château. » dit le Roi.

« Nous n'avons pas vraiment eu le choix, » répondit le prince en riant, « car la route tournait à droite et à gauche jusqu'à ce que nous ne sachions plus où nous étions, finalement, elle nous a ramené à votre château. Mais demain, nous emprunterons une nouvelle route après vous avoir fait nos adieux définitifs. »

« Néanmoins, » répondit le Roi d'un ton grave, « si par malchance vous vous trompez encore de route, je me ferai un plaisir de vous accueillir à nouveau. »

Le Prince s'inclina poliment en matière de réponse, puis il fit un signe amical à la jeune fille qu'il avait sauvée de la mort par empoisonnement. La soirée se passa ainsi agréablement en danses et en rires, et il était très tard quand il appella Nerle pour retourner à leurs appartements.

 

 

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