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Zixi, la Reine d'Ix - 3

Le don de la Cape Magique

 
À peu près à deux jours de marche de Nole, mais toujours à l'intérieur des frontières du Noland, il y avait un petit village sis au bord d'une rivière. Il consistait en un assemblage de modestes demeures, car les habitants étaient pauvres et vivaient simplement. Cependant, l'une de ces demeures semblait plus luxueuse que les autres, elle avait été construite sur la berge par le passeur, dont le métier consistait à faire traverser la rivière aux voyageurs sur son bac. Et il y avait tellement de monde qui circulait par là, qu'au fil du temps, il avait gagné assez pour bâtir un logement confortable, l'ameubler correctement et acheter des vêtements chauds à ses deux enfants ; une petite fille du nom de Margaret, mais les villageois l'appelaient Meg et son père l'avait surnommée Tignasse à cause de sa chevelure fournie.
 
Le nom de son frère, qui avait deux ans de moins qu'elle, était Timothée, mais Margaret l'appelait toujours Tim, si bien que pratiquement tout le monde l'appelait ainsi.

Comme ils avaient perdu leur mère, et qu'ils étaient tout jeunes à l'époque, le brave passeur avait essayé de jouer le rôle de père et de mère. Comme il les avait élevés dans la douceur et l'amour, ils étaient devenus de bons enfants, et tout le monde les aimait dans le village.
 
Mais un jour, un terrible malheur survint. Le passeur avait tenté une traversée pour un passager pressé, mais il n'atteignit jamais l'autre rive. Au petit matin, quand la tempête se fut calmée, ils retrouvèrent son corps sur la berge. Désormais, les deux enfants étaient seuls au monde.
 
Des voyageurs transmirent la nouvelle à Nole, où vivait la seule et unique sœur du passeur. Elle arriva quelques jours plus tard au village pour prendre ses orphelins de neveu et nièce en charge.

Tante Rivette n'était pas une mauvaise femme, mais comme elle avait travaillé dur toute sa vie, son visage et sa voix étaient sévères. Elle pensait que le meilleur moyen d'apprendre les bonnes manières aux enfants était de leur frotter régulièrement les oreilles. Ainsi, la pauvre Meg, qui avait déjà eu le cœur brisé par la mort de son père, eut beaucoup d'autres occasions de pleurer après l'arrivée de Tante Rivette au village.
 
Quant à Tim, il se montra d'abord si insolent et mal élevé que la vieille dame se sentit obligée de le corriger, si bien qu'à la fin, le garçon était devenu docile et silencieux, et il ne pleurait ni ne répondait plus à sa Tante. Cela faisait de la peine à Margaret de voir son petit frère se faire malmener ainsi, elle en devint si malheureuse qu'elle pleura du matin jusqu'au soir sans trouver de réconfort.
 
Tante Rivette, qui était blanchisseuse à Nole, avait décidé d'y retourner et d'emmener les enfants avec elle.
 
« Le garçon portera l'eau pour remplir mes bassines, et la fille m'aidera à repasser. » avait elle décidé.
 
Elle vendit alors tous les meubles ainsi que la maison, elle chargea les affaires de son défunt frère sur le dos de son petit âne, celui-là même qu'elle avait monté pour venir de Nole jusqu'au village. Il y avait tellement d'affaires que la charge avait l'air plus grande que l'âne lui même ; mais c'était un petit animal costaud, et il ne s'en plaignit pas.
 
Une fois que tout fut prêt, ils se mirent en route pour Nole. Tante Rivette tenait la bride de l'âne d'une main et le petit Tim de l'autre, tandis que Margaret les suivait, pleurant ce foyer qu'elle avait tant aimé.
 
Le voyage fut pénible, ce qui rendit la vieille femme encore plus irritable que d'habitude, elle ne cessait de gronder les enfants tout le long du chemin. Quand Tim trébuchait, comme çà arrivait souvent du fait qu'il n'était pas habitué aux longues marches, Tante Rivette lui donnait une gifle ou le secouait brutalement par le bras en le traitant de bon à rien et de petit mendiant.  Alors Tim lui lançait un regard plein de rage sans dire un mot. Quant à Meg, elle marchait derrière l'âne en pleurant et Tante Rivette ne lui prêtait guère attention.
 
 
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La première nuit, il trouvèrent asile dans une ferme, mais le matin venu, les pieds du garçon étaient si enflés et si douloureux, à cause de la longue marche de la veille, qu'il ne tenait plus debout. En lui reprochant amèrement sa faiblesse, la vieille femme percha Tim sur le dos de l'âne avec les bagages, et c'est ainsi que se déroula le deuxième jour de voyage ; Tante Rivette marchant devant en tenant l'âne et Margaret qui suivait derrière.

La blanchisseuse aurait voulu atteindre la Cité de Nole en fin de journée, mais l'âne surchargé ne pouvait avancer très vite. Quand la nuit tomba, il se trouvaient encore à deux heures de marche des portes de la Cité, ils durent donc s'arrêter dans une petite auberge. Mais l'endroit était bondé de monde, et l'aubergiste n'avait pas de chambre pour eux.
 
« Si vous voulez, vous pouvez prendre l'étable, » leur dit il, « vous aurez plein de paille pour dormir. » 
 
Ils durent donc se contenter de ces modestes conditions.
 
Le lendemain, la vieille femme les réveilla aux premières lueurs de l'aube, et tandis qu'elle ajustait les bagages sur le dos de l'âne, Margaret attendait dehors, dans la fraicheur matinale qui la faisait grelotter. La fillette ne s'était jamais sentie aussi malheureuse qu'en ce moment, elle repensait à son gentil papa et à la maison où ils avaient vécu, alors, elle s'appuya au montant la porte et éclata en sanglots.
 
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Soudain, elle sentit quelqu'un lui toucher le bras, elle leva les yeux et vit un grand jeune homme séduisant qui se tenait devant elle. Il s'agissait de la Fée Ereol qui avait pris cette apparence pour se mêler aux mortels, sur son bras reposait la Cape Magique tissée par les Fées la nuit précédente dans la Forêt de Burzee.
 
« Êtes vous malheureuse, ma chère ? » demanda Ereol d'une voix douce.
 
« Je suis la personne la plus malheureuse du monde ! » répondit la fillette en se remettant à pleurer.
 
« Dans ce cas, » dit Ereol, « je vous propose cette Cape Magique, qui a été tissée par les Fées. Quand vous la porterez, elle pourra vous exaucer un souhait, un seul. Puis, si vous la donnez de votre plein gré à un autre mortel, il pourra, à son tour, souhaiter ce qu'il veut. Utilisez cette Cape avec sagesse, et prenez en grand soin. » 
 
En disant ces mots, la Fée messagère déplia la Cape aux reflets multicolores et la posa sur les épaules de la fillette.
 
 À ce moment là, Tante Rivette la vit en faisant sortir l'âne de l'étable, alors elle demanda :
 
« Où donc as tu trouvé çà ? » 
 
« C'est cet étranger qui me l'a donnée. » répondit Meg en désignant le jeune homme.
 
« Retire moi çà tout de suite et donne le moi, ou bien tu vas recevoir une correction ! » s'écria la femme.
 
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« Halte ! » lança Ereol d'un ton autoritaire, « cette Cape appartient à cette enfant seule, si vous osez lui prendre, je vous punirai sévèrement. » 
 
« Quoi ? Me punir ?  Me punir, moi ? Misérable filou ! C'est ce que nous allons voir ! »
 
« Tout à fait, » répondit calmement Ereol, « cette Cape est un cadeau des Fées, et si vous les mettez en colère, leur châtiment sera terrible. »
 
Nul ne craignait plus les Fées que Tante Rivette, cependant, comme elle pensait que le jeune homme lui mentait, elle se précipita sur lui en brandissant sa canne, mais à sa grande surprise, il s'évapora dans l'air, alors elle comprit qu'elle avait eu affaire à une Fée.
 
« Tu peux garder ta Cape, » dit elle à Margaret avec un frisson d'effroi, « je n'y toucherais pour rien au monde ! »
 
La fillette était très fière de son vêtement scintillant, quand Tim fut perché sur le dos de l'âne et que la vieille femme se fut mise à avancer en clopinant, Meg les suivit d'un pied plus léger que la veille.
 
À présent, le soleil se levait à l'horizon, et ses rayons se reflétaient sur la Cape avec des teintes sublimes.
 
« Ah ! » dit la petite fille à mi-voix, « comme j'aimerais retrouver le bonheur perdu ! » 
 
Soudain, son cœur d'enfant bondit de joie dans sa poitrine, et elle se mit à rire en essuyant ses larmes, elle n'allait plus en verser avant longtemps. Car, bien qu'elle l'eût formulé sans y penser, la Cape Magique avait exaucé son souhait. Surprise, Tante Rivette se retourna vers elle.
 
« Que t'arrive-t-il donc ? » demanda-t-elle d'un air suspicieux, car elle n'avait jamais entendu la fillette rire depuis la mort de son père.
 
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« Le soleil brille, » répondit Meg en se remettant à rire, « l'air est doux, les arbres verts sont magnifiques, le monde est merveilleusement beau. »
 
Alors elle se mit à danser dans la poussière de la route en chantant une chanson que lui avait apprise son père.

La vieille femme marmonna quelque chose et se remit en marche d'un pas trainant. Tim regardait sa sœur avec étonnement, mais il souriait de la voir aussi joyeuse, l'âne s'arrêta et tourna solennellement la tête vers la fillette qui riait derrière lui.
 
« Mais avance donc, toi ! » s'écria la blanchisseuse en tirant la bride, « tout le monde est en train de nous dépasser sur la route, nous devons nous dépêcher pour arriver avant midi. »
 
C'était vrai, beaucoup de voyageurs les avaient dépassés à pieds ou à cheval depuis le lever du soleil, et bien que la Cité de Nole fut maintenant en vue, ils durent prendre place dans la file qui s'étendait devant la porte orientale.
 
 
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